Elaboration d’un test d’indicateur de forme physique spécifique au judo par l’étude physiologique de combats de type « shiaï »

 

Benoît Berton2, Said Ahmaïdi1-2, Michel Calmet2

1Laboratoire EA3300 "APS et Conduites Motrices: Adaptation, Réadaptation"

2Faculté des Sciences du Sport, Université de Picardie Jules Verne , 80025 Amiens Cedex1

Equipe et lieu de travail

 

Le judo est un sport de combat de préhension. Lors d’un combat en compétition, appelé aussi «shiaï », l’activité du judoka est caractérisée par une succession d’efforts statiques et dynamiques (DONZEL J. 1979). La durée effective d’un combat de judo est de 5 minutes pour une durée totale de 7 à 8 minutes. Les phases de travail ininterrompues n’excèdent pas 1 minute (RAMBIER R,1991).

Le but pour chacun des combattants est de projeter son adversaire sur le tapis ou de l’immobiliser en lui maintenant ses deux épaules sur le sol pour une durée de 25 secondes (cette durée est passée de 30 à 25 secondes en 1997). Pour gagner, le combattant a aussi la possibilité de faire abandonner son adversaire par un étranglement (shime-waza) ou une clé de bras (kansetsu-waza).

Le judoka effectue chaque attaque en apnée ; il existe donc souvent des phases de résistance (DONZEL J. 1979).Au niveau physiologique il est d’ailleurs déclaré que lors d’un randori du judo, l’effort, qui se caractérise par un métabolisme aérobie dominant, sollicite aussi largement les processus anaérobies lactiques (RAMBIER R,1991).

 

On retrouve, dans le judo, différentes phases de travail caractéristiques de cette activité dite multifactorielle :

Des phases de travail debout (nage-waza) caractérisées par un effort isométrique au niveau du train supérieur (utilisation de la force statique) et travail dynamique voire explosif au niveau du train inférieur (utilisation de la force stato-dynamique et dynamique).

Des phases de travail au sol (ne-waza) où l’effort est surtout isométrique (utilisation de la force pseudo-dynamique maximale) pour permettre le contrôle de son adversaire (LEPLANQUAIS F. et al, 1995)

 

De nombreux tests d’aptitude physique de terrain permettent de donner des indications sur la consommation maximale d’oxygène (VO2 max.) et la vitesse maximale aérobie (VMA) d’un sujet. Cependant ils restent des indicateurs très généraux quant au potentiel physique des sportifs et semblent peu tenir compte de la spécificité des différentes activités physiques et sportives.

Malgré des essais d’adaptation au judo ces tests (THOMAS P. et al, 1989) semblent trop peu représentatifs de la spécificité de l’activité.

En effet l’effort produit lors de ce test est continu et ne laisse que peu de place à la récupération lors de sa réalisation.

Lors d’un shiaï l’effort du judoka est certes violent mais ne représente en moyenne, que des séquences d’une vingtaine de secondes entrecoupées par des séquences de repos allant de 1,5 à 27 secondes (CASTARLENAS J. et al, 1997).

De plus les efforts statiques (contractions musculaires isométriques qui ne génèrent pas de mouvement) semblent peu pris en compte dans ces tests, alors que les combats de judo sont généralement composés d’une succession d’efforts statiques (fixation de uke) et dynamiques (engagement d’une technique de projection).

Seul le travail au sol, représentant une période très courte du combat, peut être assimilé à un effort continu.

Notre objectif principal est donc de tenter de mettre au point un test de terrain représentatif d’un combat de judo tant au niveau qualitatif (respect des différentes phases de judo et des efforts fournis) qu’au niveau quantitatif (durée des séquences de travail, de repos …), ceci dans le but de nous donner des indications relatant de l’état de forme d’un sujet et de son adaptation cardio-vasculaire à un effort spécifique de l’activité judo.

Pour cela nous étudierons, dans un premier temps les données relevées lors de combat types «shiai » (compétition) puis nous les utiliserons pour l’élaboration du test. Cette démarche nous permettra ainsi de nous appuyer sur des données concrètes observées sur le terrain et propres aux niveaux des judokas. Ces valeurs seront aussi comparées aux données bibliographiques traitant de ce domaine afin de mesurer un éventuel écart.

Le test ainsi élaboré sera effectué par des judokas confirmés (ceinture noire) et pratiquant la compétition à des niveaux différents (Niveau régional à national. Les résultats obtenus seront analysés et comparés aux valeurs mesurées lors des «shiai » afin de déterminer la représentativité du test.

Nous pourrons alors nous interroger sur le degré de sensibilité de ce test en comparant les données des sujets entraînés et celles des sujets peu entraînés.

 

Matériel et méthodes

Sujets

Quatorze judokas volontaire, de sexe masculin, âgés en moyenne de 19,7 + 2,4 ans, ceinture noire, d’un niveau régional interrégional ou national ont été sélectionnés pour cette étude.

Les caractéristiques anthropométriques moyennes sont de 180,2 + 4,9 pour la taille et de 76,3 + 6,9 pour le poids.

Protocole expérimental de l’épreuve physique de type « shiaï »

Le partenaire du judoka effectuant le test a pour consigne de s’investir dans un de judo type «shiaï » (compétition). Ce combat a lieu sur une surface aux normes de la Fédération Française de Judo et Disciplines Associées (FFJDA) et est arbitré par un arbitre confirmé selon le règlement de la FFJDA.

L’adversaire est d’un niveau équivalant et combat dans la même catégorie de poids.

Les judokas témoins sont tous ceintures noires et compétiteurs de niveau régional minimum.

Le judoka expérimenté est équipé d’un cardiofréquencemètre qui enregistre la fréquence cardiaque du sujet toutes les 5 secondes (Cardiofréquencemètre de type ACUREX PLUS et SPORT TESTER PE 4000). Les valeurs mesurées seront alors retranscrites sur l’axe du temps afin de déterminer l’évolution de la fréquence cardiaque du sujet au cours du combat. Le cardiofréquencemètre se compose d’un capteur, maintenu par une sangle élastique au niveau du torse du sujet, et d’une montre réceptrice à son poignet. Le capteur et la montre sont protégés par des bandes de mousse et sont maintenus au corps du sujet par des bandes cohésives. L’équipement ne représente aucune gêne pour les deux combattants.

Avant le combat les sujets disposent d’une période d’échauffement qu’ils gèrent individuellement.

Ce premier test va nous permettre, par l’étude de la courbe de fréquence cardiaque, de nous donner des indications sur l’adaptation cardiaque d’un judoka lors d’un randori de 5 minutes effectives.

Par cette étude nous essaierons de caractériser les types d’effort produits et les capacités qu’a l’individu à récupérer pendant les périodes de repos (correspondant au «mate » sur la courbe binaire).Pour cela nous calerons sur l’axe du temps (axe des abscisses) la courbe de fréquence cardiaque et la courbe binaire correspondant aux périodes d’action et de repos. Cette dernière courbe est obtenue par un programme informatique qui permet, à la visualisation des combats et par simple pression sur le clavier (touche « A » pour les phases d’action et touche « B » pour les phases de repos) de représenter automatiquement et graphiquement une courbe binaire correspondant aux différentes phases du combat.

D’autre part les profils des différents combats seront analysés et comparés aux données bibliographiques sur ce domaine (temps effectif du combat, moyenne des temps de récupération, moyenne des temps d’action, nombre de séquences d’action et de récupération) pour tenter de tirer des conclusions quant à la représentativité des combats effectués.

 

Recueil des données

 

Chaque combat est représenté graphiquement par quatre courbes mise en phases pour permettre une meilleure lecture des données.

La courbe bleue représente l’évolution de la fréquence cardiaque du sujet pendant le test.

La courbe binaire noire correspond aux périodes de repos (mate) et aux périodes de combat réel (hajime). Notons que les périodes de combat réel débute lorsque les deux judokas se sont saisis le judogi.

La courbe binaire rouge reprend les phases de travail debout et les phases de travail au sol.

Enfin la courbe verte représente la courbe de tendance la plus représentative de la fréquence cardiaque. L’équation de cette courbe est déterminée par la méthode des moindres carrés et nous donne l’équation dont le coefficient de corrélation est le plus élevé (Opération effectuée par le logiciel «kurwin 40 »).

Sur le graphique chaque relevé de fréquence cardiaque par le cardiofréquencemêtre est représenté par un un petit trait vertical.

 

RESULTATS ET ANALYSE DES DONNEES

Comparaison des valeurs mesurées en shiaï comparées aux données de la littérature

 

 

 

 

 

CASTARLENAS (1997)

RAMBIER (1991)

FAVRE-JUVIN (1889)

 

Valeur .

Min relevée sur un combat

Valeur

Max. relevée sur un combat

Moy.*

Min. relevée sur un combat

Moy.*

Max. relevée sur un combat

Moy.

 

Gal**

Valeur

Min. relevée sur un combat

Valeur

Max. relevée sur un combat

Moy.

 

Gal**

 

 

En minutes et secondes

Durée du combat

06:50

07:58

 

 

07:06

 

 

 

7 à 8 min

 

Durée de pause

02:15

03:23

 

 

02:43

00:03

05:34

01:41

 

 

Durée effective de combat (contact)

04:03

04:44

 

 

04:24

00:05

05:00

02:52

 

 

sol

01:21

02:16

 

 

01:33

00:04

01:29

00:54

 

 

debout

02:19

03:23

 

 

02:51

00:04

04:21

02:05

 

 

durée des séquences debout

00 :04

00 :42

8,29 sec

15,25 sec

11,90’’

00 :04

01 :16

00 :17

 

 

durée des séquences au sol

00 :02

00 :53

8,10 sec

17sec

11,28’’

00 :01

01 :34

00 :18

  

  

durée des séquences de pause

00 :04

00 :59

9,06 sec

15,15 sec

12,10’’

1,5 sec

00 :27

12,42 sec

 

entre10 et 20 sec

durée des séquences

00 :04

01 :10

14,29 sec

25 sec

19,59’’

00 :05

01 :16

00 :18

< 1 min

entre 20 et 40 sec

nombre de séquences debout

11

19

 

 

14,50

1

19

8,22

 

 

nombre de séquences au sol

6

11

 

 

8,38

0

11

2,98

 

 

nombre de séquences de pause

10

18

 

13,50

 

 

 

  

  

En battements par minute

Fréquence cardiaque max.

189,00

221,00

 

 

197

 

 

 

195

 

Fréquence cardiaque min de récupération

169,00

186,00

 

 

175

 

 

 

 

 

Fc max. - Fc min de récupération

13,00

51,00

 

 

22

 

 

 

 

 

Fréquence cardiaque moyenne

 

 

178

191

184

 

 

 

180

 

* Ces moyennes sont relevées sur un combat et représentent la valeur moyenne obtenue en additionnant les données relevées dans un combat et en divisant par le nombre de séquence correspondant à ces données.

** La moyenne générale est la valeur moyenne obtenue en additionnant les données de tous les combats et en divisant par le nombre de combats.

 

Nous constatons, en comparant les données relevées lors des shiaï à celle des valeurs bibliographiques qu’il existe une différence certaine sur les durées moyennes des séquences ; ceci semble s’expliquer par la possibilité, en compétition, de finir le combat avant la limite du temps effectif. On remarquera pourtant que les données prélevées lors des tests sont comprises entre les valeurs maximales et les valeurs minimales données dans les différents articles traitant de ce sujet.

 

Remarques sur l’étude des courbes

Chez les sujets entraînés chaque action forte se caractérise par une augmentation importante de la fréquence cardiaque suivie d'une chute brutale. Ce phénomène se traduit sur le graphique par un pic bien distinct.

On constate que l'équation de cette courbe est différente selon la quantité d'entraînement des sujets. Ceux qui s'entraînent au pôle espoir de Picardie présente une courbe d'équation y=a*(x/b)^c*e^(x/b) alors que les autres présentent une courbe d'équation y=a*b^(1/x)*x^c (y représentant la fréquence cardiaque, x le temps et a, b et c des invariants propre à chaque sujet)

 

Elaboration du test spécifique à l’activité judo

Sur l’aspect quantitatif ce test de terrain essaiera de respecter au maximum les exigences d’un randori de judo. Ainsi il comportera :

  1. Une phase de travail isométrique au niveau des membres supérieurs correspondant à la phase de fixation (importante en compétition).

  2. Une phase de travail debout (nage-waza) constituée d’uchi-komi (répétition d’actions successives correspondant au déséquilibre et au placement dynamique du corps ) et de projection.

  3. Une phase de travail au sol (ne-waza).

Ces différentes phases seront intégrées dans une séquence de travail qui sera effectuée à une intensité maximale. La répétition de ces phases de travail sera entrecoupée par des séquences de repos décroissantes tout au long du test.

La difficulté de ce test résidera donc dans le fait d’enchaîner des séquences de travail intenses en gérant des périodes de récupération de plus en plus brèves.

 

En ce qui concerne l’aspect quantitatif, nous avons relevé pour chaque séquence les valeurs maximales et minimales déterminées lors de nos mesures sur le terrain puis nous les avons comparées aux valeurs bibliographiques pour fixer les paramètres de notre test.

 

Durée du test :

Valeurs mesurées : Entre 6’50’’ et 7’58’’

Valeurs bibliographiques : Entre 7’ et 8’ (RAMBIER (1991))

On notera que ce temps de travail sera celui nécessaire aux adaptations aérobie du judoka (LEGER L. et Coll., 1984).

Durée choisie pour le test : 7’20’’

 

Durée des séquences de travail

Valeurs relevées : Entre 4’’ et 1’ 10’’

Valeurs bibliographiques : Entre 5’’ et 1’16’’ (CASTARLENAS (1997))

Entre 20’’ et 40’’ (FAVRE-JUVIN (1989))

Durée choisie pour le test : 25’’

 

Durée des séquences de pause

Valeurs relevées : Entre 4’’ et 59’’

Valeurs bibliographiques : Entre 1,5’’ et 27’’ (CASTARLENAS (1997))

Durée choisie pour le test : Entre 3’’ et 30’’

 

Nombre de séquences de travail

Valeurs relevées : Entre 11 et 19

Valeurs bibliographiques : entre 1 et 19 (CASTARLENAS (1997))

Nombre de séquences choisies pour le test : 11

 

Protocole expérimental

Le judoka expérimenté doit réaliser 11 fois un effort de 25 secondes entrecoupé par des périodes de récupération allant de 30'' à 3". Ce temps de récupération décroît de 3" à chaque palier. Durant les 25 secondes d'effort, le judoka devra réaliser à vitesse maximale, sans pour autant négliger l'aspect technique de l'activité, différentes phases caractéristiques d'un randori de judo.

 

La séquence de travail est répartie comme suit :

La saisie : durant 6" les judokas devront se saisir, l'objectif pour celui qui réalise le test étant de fixer son partenaire.

La répétition d'une technique : Exercice primordial dans l'entraînement d'un judoka, la répétition d'une technique de projection sans faire chuter (uchi-komi) fait travailler, chez le judoka, sa vitesse de jambe et sollicite chez ce dernier les chaînes musculaires des membres supérieurs et du dos.

Durant le test le sujet expérimenté réalisera 5 uchi-komi sur un mouvement d’épaule (Seoï nage).

Les projections : Cet effort bref et intense se réalise en apnée, il sollicite de manière explosive les muscles des membres supérieurs et inférieurs. Lors du test le sujet enchaînera après ces uchi komi sur 2 projections .La seconde sera suivie d'une liaison debout/sol.

Le travail au sol. Après avoir retourné rapidement son partenaire le judoka engagera son bras pour tenter une clé de bras : le travail des bras se fait alors en isométrie.

Recueil des données

Chaque test est représenté graphiquement par trois courbes mises en phases pour permettre une meilleure lecture des données :

La courbe bleue représente l'évolution de la fréquence cardiaque du judoka pendant le test.

La courbe binaire noire correspond aux périodes de travail et aux périodes de repos.

La courbe verte représente la courbe de tendance la plus représentative de la fréquence cardiaque.

La différence sur chaque palier entre la Fc max. et la Fc min Ces données seront représentées sur un graphique permettant de comparer le profil de chaque judoka concernant la récupération. Ces relevés pourront alors peut-être nous permettre d’émettre des hypothèses quant à la sensibilité du test.

 

Résultats

Comparaison des valeurs relevées sur l’ensemble des tests

 

Valeur minimale relevée sur l'ensemble des tests

Valeur maximale relevée sur l'ensemble des tests

Valeur moyenne (addition des moyennes des différents tests divisé par le nombre de tests)

Fréquence cardiaque maximale relevée (bat/min)

 

179

 

198

 

191

Fréquence cardiaque minimale relevée (bat/min)

 

149

 

185

 

164

Fréquence cardiaque moyenne (bat/min)

 

167

 

191

 

179

 

FC max. –Fc min.

12

38

26

 

ANALYSE

Comparaison graphique entre les mesures des tests et des shiaï

Tableau 1

Tableau 2

Tableau 3

Tableau 4

La Fréquence cardiaque moyenne (tableau 1) est obtenue en additionnant les valeurs moyennes de fréquences cardiaques des différents tests ou combats et en les divisant par le nombre de tests ou de combats

Les moyennes des fréquences cardiaques maximales et minimales (Tableau 2 et 3) sont obtenues en additionnant les valeurs maximales ou minimales et en les divisant par le nombre de tests ou de combats.

La différence moyenne entre les fréquences cardiaques maximales et minimales (Tableau 4) est obtenue en additionnant la différences entre ces deux valeurs sur chaque test ou combat et en divisant par le nombre de tests ou de combats.

Comparatif des valeurs relevées

 

 

 

COMBAT

 

TEST

DONNEES BIBLIO-GRAPHIQUES

 

Valeurs limites

Moyenne

Ecart type

Valeurs limites

Moyenne

Ecart type

R. Rambier

Fréquence cardiaque moyenne (bat/min)

 

Entre 178 et 191

 

184

 

4,46

 

Entre 167 et 191

 

179

 

6,92

 

180

Fréquence cardiaque maximale (bat/min)

 

Entre 189 et 221

 

197

 

10,64

 

Entre 179 et 197

 

191

 

6,30

 

195

Fréquence cardiaque minimale (bat/min)

 

Entre 169 et 186

 

175

 

6

 

Entre 149 et 185

 

164

 

10,65

 

Fc max.- Fc min.

Entre 13 et 51

22

12,26

Entre 12 et 38

26

7,56

 

 

Ce tableau fait apparaître un écart faible entre les valeurs de fréquence cardiaque observées du test et celles mesurées en shiaï. On note cependant que les premières restent inférieures aux secondes.

Ceci peut s’expliquer par le manque d’opposition physique dans le test, qui dans le combat de type compétitif semble se traduire par des pics de la fréquence cardiaque montant jusqu’à 221 battements par minute.

Cependant on peut noter tout de même que la fréquence cardiaque moyenne du test est proche de celle relevée en combat.

Les fréquences cardiaques maximales relevées jusqu’à 197 battements par minute semblent aussi représenter un facteur important quant à la justification de la difficulté physiologique du test.

En effet cette valeur correspond pratiquement à la fréquences cardiaque maximale théorique du sujet (dans ce cas Fc=220-18 =202 battements par minute).

 

DISCUSSION

Représentativité du test

A travers ce test notre objectif était de retrouver un effort semblable à celui fourni lors d’un combat de judo tant au niveau des sensations qu’au niveau de l’effort en lui-même : les judokas devaient à l’issu du test, être amenés à épuisement et nous espérions noter une baisse du rythme dans la réalisation des techniques, une dégradation dans cette même réalisation ou éventuellement les deux (BRAND O., 1992).

Pour mieux nous rendre compte de ces facteurs, nous avons demandé aux judokas leurs sensations sur ce test à travers plusieurs questions :

Ce test vous a t-il paru difficile ? Si oui, à quel niveau ?

Dans le test, quand avez vous commencé à ressentir une rupture dans le rythme ou dans la réalisation technique?

Est-il représentatif de l’effort que vous fournissez dans un combat de judo ?

Ce questionnaire très succinct a révélé, que pour une grande majorité, ce test était éprouvant à cause du rythme saccadé et des passages debout/sol. Un judoka a aussi souligné une difficulté sur le plan cognitif à enchaîner les différentes séquences.

Cinq judokas se sont rendu compte d’une baisse de leur performance dans les deux ou trois derniers paliers et tous reconnaissent des similitudes entre ce test et l’effort produit lors d’un combat de judo notamment au niveau du rythme.

Après avoir visionné la réalisation du test par chacun d’eux, nous avons vérifier ces propos et remarqué que tous les sujets ont été victime d’une rupture dans la vitesse d’exécution des techniques et notamment des uchi komi.

Cette rupture se produit plus ou moins tardivement selon le judoka. Elle annonce souvent une dégradation sur le plan technique surtout dans le dernier palier (manque de contrôle lors des uchi komi, déséquilibre lors des projections, uchi komi incomplet…)

Ce constat nous semble être un indicateur quant à l’épuisement recherché dans la réalisation du test.

Les mesures de fréquences cardiaques relevées semblent renforcer cette tendance :

 

Sensibilité du test

Les deux seuls éléments qui peuvent nous permettre de justifier des hypothèses quant à la sensibilité de ce test sont la fréquence cardiaque d’une part et le niveau d’entraînement des sujets expertisés d’autre part.

Nous avons donc comparé des données entre les sujets entraînés et les sujets peu entraînés. Notons que la différence est flagrante puisque les premiers s’entraînent de façon régulière et intenses à raison de 5 fois par semaine en plus des compétitions, tournoi et préparation physique générale alors que les second ne s’entraînent que trois fois par semaine au maximum dans leur club respectif en n’ont pas comme priorité principale la réalisation de performance en compétition de haut niveau.

En résumé nous avons un groupe de judokas de haut niveau et un groupe de judokas confirmés mais d’engagement modéré vis à vis de la compétition.

Tout d’abord, les sujets entraînés semblent présenter une fréquence cardiaque moyenne bien inférieure à celle des sujets peu entraînés.

L’élévation de la fréquence cardiaque est plus progressive chez les sujets entraînés.

La récupération chez ces derniers semble plus importante ; elle se traduit sur le graphique par une baisse plus prononcées de la fréquences cardiaque pendant les phases de repos.

On peut interpréter ces résultats par le fait que les judokas entraînés gèrent mieux leurs efforts pendant le test. Ils ont une meilleure adaptation cardio-vasculaire à l’effort et enchaînent des phases d’effort intenses debout et au sol avec des phases de récupération plus ou moins longues.

 

CONCLUSION

Ce test de terrain semble présenter un double intérêt : celui d’être facilement reproductible (exigence d’un test de terrain) et celui de prendre en compte une grande partie de ce qui est spécifique à la pratique du judo en compétition (séquence de travail et de repos, intensité, facteur temporel, phase technique).

Réalisé dans des conditions idéales (motivation, choix de la période, matériel) ce test semble être un bon indicateur quant à l’état de forme des judokas. Ils retrouvent en effet des sensations et des actions spécifiques à l’activité tant sur le plan technique (enchaînement des actions, spécificité et variété des techniques) que sur le plan physiologique (essoufflement augmentation de la fréquence cardiaque, récupération, rupture du rythme de travail). En ce sens, ce test semble assez représentatif de l’effort fourni dans un combat de judo.

De plus l’étude des résultats obtenus fait apparaître différents niveaux d’entraînement chez les judokas expérimentés. Ce constat tend alors à prouver une certaine sensibilité dans ce test.

Le nombre de sujets expérimentés, quant à lui nous incite à une certaine prudence dans l’extrapolation des résultats.

 

Références bibliographiques

BRAND O. Comparaison de la fréquence cardiaque lors de deux exercices de Judo en Nage-Komi. Mémoire de DEA STAPS, UFR STAPS Besançon, 1992,32p

CASTARLENAS J.P., PLANAS A. Estudi de l’estructura temporel del combat de judo, Educ. Fis. Esport , 1997 ,47 , 32-39.

DONZEL J. Contribution à l’étude d’un profil de judoka de haut niveau à l’aide de tests de valeur physique de Fleishmann. PARIS, Mémoire INSEP, 1979,132p.

FAVRE –JUVIN A. et Coll. Approche physiologique du judo. Sport et médecine, 1989, 40, 5-10.

LEGER L. ; LAMBERT J. ; GOULET A. ; ROWAN C. ; DINELLE Y. ; Capacité aérobie des québécois de 6 à 17 ans. Test navette de 20 m avec palier de 1 min. Can. J. appl. Spt. Csi., 1984, 9, 64-69.

LEPLANQUAIS F. ; COTINAUD M. ; LACOUTURE P. ; TRILLES F. ; MAYEUR H. ; Proposition pour une musculation spécifique : Exemple du judo Cinésiologie, 1995, 160, 80_86.

PRADET M. La préparation physique, collection entraînement, INSEP publication, 1996.

RAMBIER R. Programmation de l’entraînement chez le judoka de haut niveau. 2ème journée médicale de la F.F.J.D.A., 1991.

THOMAS P., GOUBAULT C., BEAU M.C. Judokas. Evolution de la lactatémie au cours de randoris successifs. Médecine du sport, 5, 234-236, 1990

THOMAS P., Goubault C., BEAU M.C., BRANDET M.J.P. Test d’adaptation au judo dérivé du Test Léger/Mercier, Médecine du sport, 1989, 63,6, 286-288

VALLIER JM. , BRISSWALTER J., HANON C. Estimation du potentiel aérobie en boxe anglaise à partir d’un test spécifique de terrain. IVème journée de réflexion et de recherche sur les sports de combat et les arts martiaux, Poitiers, 1996